30 mai 2025
1. Le format hybride s’installe durablement
Le digital est devenu un levier stratégique pour les établissements d’enseignement supérieur. Entre attractivité, innovation et efficacité, chaque école ou université cherche aujourd’hui à structurer son offre numérique.
Mais où en est réellement la digitalisation en 2025 ?
Ce baromètre basé sur l’enquête de l’ISTF dresse un état des lieux factuel, pour mieux comprendre les forces et les freins en présence.
Cette année, la répartition des formats d’apprentissage dans l’enseignement supérieur révèle une tendance désormais bien ancrée :
En effet, 40 % des parcours sont dispensés exclusivement en présentiel, contre 40% en blended learning combinant présentiel et distanciel et 20% en full distanciel.
La pandémie a accéléré l’hybridation. Aujourd’hui, 6 parcours sur 10 incluent une part significative de digital. Ce n’est plus une exception, mais une norme.
Le retour au tout-présentiel, bien qu’encore courant, n’est plus dominant. Les établissements ont compris que la flexibilité des formats constitue un levier d’engagement et d’efficacité.
Mais quelles modalités pédagogiques dominent aujourd’hui ?
Si l’hybridation s’impose, toutes les modalités n’évoluent pas au même rythme. Ce graphique révèle des tendances profondes.
Le présentiel reste dominant (86 %), mais perd 4 points. Il conserve sa place par nécessité (notamment pour les compétences pratiques), mais cède du terrain face à des formats plus flexibles.
📉 Les classes virtuelles et le e-learning scénarisé se stabilisent, montrant une forme de maturité dans leur adoption.
📈 En revanche, certains formats connaissent une vraie dynamique ascendante :
Le micro-learning (+1 pt) s’impose par sa capacité à s’intégrer facilement au quotidien.
Les serious games (+5 pts) confirment l’intérêt pour des approches plus immersives et engageantes.
La réalité virtuelle (+4 pts) n’est plus un gadget : elle devient une modalité crédible pour des usages très concrets (industrie, sécurité, médecine, immobilier…).
📉 A contrario, le social learning perd du terrain (-3 pts), révélant peut-être une difficulté à l’orchestrer efficacement à grande échelle.
Conclusion ? On assiste à un rééquilibrage progressif entre formats classiques et approches plus innovantes. Ce sont les modalités qui conjuguent impact, souplesse et engagement qui gagnent du terrain.

Enquête ISTF : Les chiffres du digital learning 2025
Pour éclairer ces tendances, Florian Larbelestier, Directeur du Pôle Conseil et Ingénierie pédagogique chez Kwark, rappelle que :
“La formation synchrone reste logiquement en tête : Il faut dire que l’enseignement en présentiel bénéficie de plusieurs siècles d’ancrage culturel, alors que le e-learning, lui, ne compte que quelques décennies d’existence. Ce décalage explique en partie pourquoi le digital peine encore à s’imposer pleinement. Il subsiste aussi une perception de moindre qualité sur le e-learning par rapport au présentiel, une image qui tend toutefois à s’estomper.
Viennent ensuite l’e-learning scénarisé et le vidéo learning. Rien d’étonnant : ce sont les formats historiques du digital learning, les plus utilisés depuis ses débuts.
Les modalités plus récentes progressent quant à elles, notamment parce qu’elles répondent mieux aux attentes actuelles : formats plus courts, plus interactifs, plus ludiques. Ils s’adaptent aussi à l’évolution de notre capacité d’attention, qui s’est largement réduite. De plus, ces formats produisent souvent de meilleurs résultats, tant en rétention qu’en acquisition de compétences pratiques, c’est un enjeu clé.
L’essor de l’IA joue également un rôle clé : elle facilite et accélère grandement la production de ces formats.
Seul le social learning est en léger recul. Cela s’explique par les difficultés de mise en œuvre : Animer une communauté apprenante demande du temps, de la méthode et beaucoup d’engagement. Nombreux sont ceux qui ont tenté sans parvenir à en faire un véritable levier pédagogique !
Enfin, la réalité virtuelle reste encore marginale. Elle souffre de coûts de production et d’équipement élevés, et elle ne se prête pas à tous les sujets. En revanche, son intérêt pour la mise en situation concrète et l’apprentissage par la pratique est de plus en plus reconnu.”
2. Équipés, mais pas encore matures
Les équipements sont là, plus de 90 % des établissements disposent aujourd’hui d’un LMS (Learning Management System) comme Moodle, Teams, ou encore TBook.
Et 86 % des structures affirment vouloir renforcer leur usage du digital dans les années à venir.
Mais entre intention et action, le fossé persiste.
5 freins sont bien identifiés :
Manque de temps,
Manque de budget
Manque de compétences numériques internes,
Sous-effectifs dans les équipes pédagogiques,
Manque d’adhésion des formateurs
La transformation digitale est enclenchée, mais elle reste fragile, car si les outils sont installés, leur intégration dans les usages pédagogiques quotidiens reste hétérogène.
La transition numérique repose moins sur la technologie que sur les moyens humains et organisationnels mis en œuvre.
3. Ce qui engage vraiment les étudiants
On l’oublie souvent, mais un parcours digitalisé n’est pas automatiquement un parcours engageant. Ce qui motive les apprenants à s’investir jusqu’au bout, c’est d’abord la perspective d’obtenir une preuve de compétence (une certification valorisante, un badge, une micro-certification).
En seconde position : la présence d’un tuteur.
Les chiffres sont éloquents :
65 % des dispositifs tutorés atteignent un taux de complétion supérieur à 60 %.
En revanche, dans les parcours non tutorés, 58 % peinent à dépasser les 10 % de complétion.

Enquête ISTF : Les chiffres du digital learning 2025
L’humain reste un facteur de réussite clé.
Enfin, l’expérience utilisateur (ergonomie, clarté, accessibilité mobile) pèse lourd dans l’assiduité des étudiants. Un bon LMS mal utilisé devient vite un facteur de décrochage.
Notons également que la digitalisation ne peut être réussie sans une prise en compte de l’accessibilité : sous-titrage, compatibilité mobile, design inclusif. Des éléments essentiels pour répondre aux besoins des apprenants à profils variés.
4. Quels outils pour produire et diffuser les contenus de formation ?
La majorité des établissements conçoivent désormais leurs modules en interne : 76 % d’entre eux internalisent la production pédagogique. Un choix stratégique qui permet de mieux maîtriser le fond et la forme, et de s’adapter plus vite aux besoins de terrain.
Quels outils sont alors mobilisés dans ces projets de digital learning ?
Les données du baromètre ISTF 2025 révèlent une diversité marquée :
📌 Côté production :
41 % utilisent des outils génériques (PowerPoint, Genially, Google Forms…),
30 % optent pour des outils auteurs spécialisés (Adobe, Articulate, Kumulus…),
29 % intègrent des outils d’activités interactives (Klaxoon, Wooclap, Kahoot…).
📌 Côté diffusion :
37 % s’appuient sur des plateformes LMS/LXP payantes (Rise Up, 360Learning, Talentsoft…),
34 % privilégient des outils non spécifiques (Slack, YouTube, Teams…),
29 % utilisent des LMS/LXP gratuits comme Moodle ou ParcOoroo.

Enquête ISTF : Les chiffres du digital learning 2025
Un usage multiple, souvent hybride, qui révèle l’ingéniosité des équipes pour combiner accessibilité et efficacité. Mais aussi une limite : ces outils ne font pas tout.
Sans ingénierie pédagogique solide ni accompagnement humain, ils restent sous-exploités.
C’est ici que les outils d’IA générative (comme BlendGen) viennent en renfort. De plus en plus d’établissements s’y intéressent pour automatiser la scénarisation, incarner leur contenus ou encore pour générer des quiz. Ces technologies promettent un gain de temps, mais elles ne remplacent pas l’expertise. Elles en sont le prolongement.
5. Soutien public et bonnes pratiques : l’exemple de l’UTBM
Certaines initiatives montrent la voie. L’Université de Technologie de Belfort-Montbéliard (UTBM), par exemple, a bénéficié d’une subvention de 42 000 € dans le cadre de France Relance.
Objectif : former ses enseignants à l’usage pédagogique du numérique.
Les actions mises en place ?
Recrutement d’un ingénieur pédagogique,
Accompagnement pair-à-pair,
Heures de formation,
Ce projet piloté par Florence Bazzaro, directrice de formations et de la pédagogie, illustre ce que pourrait être un modèle réplicable dans d’autres établissements.
En effet, car la réussite de la digitalisation passe d’abord par l’humain.
Former les formateurs, c’est construire une culture numérique durable.
Mais c’est aussi leur donner les clés pour concevoir, animer et adapter les dispositifs digitaux aux nouvelles tendances.
Et c’est justement la mission de notre solution Digital Trainer, dédiée à la professionnalisation des formateurs, ingénieurs pédagogiques et tuteurs.
Enfin, au-delà des financements et de l’équipement, un autre facteur clé de réussite réside dans la capacité à mesurer l’impact des dispositifs digitalisés. Taux de complétion, satisfaction des apprenants, taux de certification ou d’insertion : autant d’indicateurs essentiels pour ajuster et faire évoluer les formats.
6. Et à l’échelle européenne ?
Comparée à ses voisins, la France n’est pas en retard, mais elle n’est pas leader non plus. Le Royaume-Uni, contraint par la baisse des inscriptions internationales post-Brexit, a investi massivement dans le digital learning pour maintenir son attractivité.
Résultat : des plateformes plus robustes, une offre à distance plus cohérente.
Sur le plan pédagogique, l’Europe se distingue des États-Unis et de l’Australie en misant davantage sur l’innovation éducative : gamification, storytelling, réalité augmentée, IA…
La France s’inscrit pleinement dans cette dynamique d’innovation, et dispose d’un potentiel fort pour accélérer davantage grâce à une stratégie plus structurée et partagée à l’échelle nationale.
En 2025, les écoles françaises sont clairement engagées dans leur transformation digitale. Mais cette transition reste inégale. Le numérique ne se résume pas à un LMS ou à des vidéos e-learning.
L’enjeu aujourd’hui ?
Passer du déploiement technique à la stratégie pédagogique. Il ne s’agit plus d’ajouter du digital, mais de repenser les dispositifs, de former les équipes, et d’investir dans des ressources capables d’ancrer cette évolution.
La digitalisation est bien là. Ce qu’il reste à faire : la rendre pertinente, fluide et engageante.
30 mai 2025