Stéfan Crisan est un expert du monde de la formation. Il a œuvré au développement d’écoles de commerces et d’ingénieurs. Ses pratiques pédagogiques innovantes (e-learning de proximité, Fabrique d’Innovation Managériale, transformation des pratiques par l’immersion en contexte décalé…) stimulent l’évolution et l’engagement des participants. Il est convaincu que les progrès technologiques peuvent aider les acteurs de la formation à enrichir leurs missions. A ce titre, Stéfan exprime dans cet article sa vision des défis liés à l'évaluation dans le domaine de la formation.
Une nouvelle donne des métiers de l’éducation
Pendant une vingtaine d’années, j’ai accompagné des femmes et des hommes à développer leur potentiel et leurs compétences managériales. J’ai pu les observer et les écouter témoigner d’un contexte professionnel devenu très complexe. Ils sont aujourd’hui confrontés à quatre évolutions majeures : une complexité des activités grandissante, un contexte général turbulent et incertain, le renforcement des tensions et des crises au sein des entreprises, l’impact des transitions climatiques, énergétiques, sociétales et digitales.
Il y a un parallèle saisissant entre cette complexité croissante de notre société et le contexte actuel des métiers de l’éducation. Les formateurs, enseignants et leurs managers sont confrontés à la nécessité de faire évoluer profondément et rapidement leurs pratiques, leurs expertises, leurs visions.
Pour réussir dans leur mission, ces professionnels réalisent une ingénierie plus poussée, des innovations pédagogiques grâce à des expérimentations collectives, un suivi plus individualisé, une digitalisation de leurs activités pertinentes, …
Ainsi, ils expérimentent pour relever les défis de la nouvelle donne de l’éducation.
Y a-t-il d’autres choix que celui d’oser, tester de nouvelles postures dans des cadres pédagogiques hybrides, de développer de nouvelles formes d’interactivité et de suivi des nouvelles générations ?
L’évaluation : un mythe de Sisyphe des temps moderne
J’ai commencé ma carrière dans le développement d’innovations industrielles. Au cours de ces missions, j’ai tout de suite expérimenté ces phases de projet où finalement personnes ne sait décrire avec précision et certitudes les services attendus ou les caractéristiques des innovations à développer. Dans ce contexte, les idées créatives se croisent et s’enrichissent pour former des convergences d’idées qui s’agrègent petit à petit.
Lors de mes premières missions dans l’enseignement supérieur, j’ai retrouvé cette pétillance dans la conception de cursus de transformation managériale, la mise en place des 1ers dispositifs e-learning de proximité… L’arrivée progressive de l’Intelligence Artificielle dans le champ de l’éducation est certainement un des leviers majeurs d’innovation pédagogique. Ces dernières années, au cours de mes échanges avec les professionnels de l’éducation, le thème de l’évaluation revenait souvent comme un point sensible de leur métier, une activité difficile à réaliser.
Mes échanges avec les enseignants, directeurs de programme, responsables de scolarité et étudiants ont été saisissants. Les retours qui m’ont été fait soulignaient tous l’âpreté de la tâche et son lot de frustrations. En effet, les écarts entre les pratiques constatées de la correction d’examen et les enjeux critique de l’évaluation sont considérables. Comment satisfaire au devoir d’équité et de transparence ? Comment utiliser cette activité clé pour réaliser un vrai bilan pédagogique de fin de module de formation ou de fin de cursus ? Comment se saisir de toutes ces informations pour construire un vrai outil de pilotage menant à l’excellence pédagogique et à la maîtrise de la qualité des enseignements ? Autant de questions restées sans réponse et nous plongeant dans une certaine circonspection !
Les apprenants déplorent la disparité des évaluations, le temps de retour trop long et les commentaires sibyllins. Ce peu de matière ne leur permet pas d’effectuer un bilan sur leur réel niveau d’apprentissage. Les approfondissements éventuels sont alors l’exclusivité des plus motivés voir des passionnés du sujet étudié.
Pour le formateur ou l’enseignant, l’évaluation est souvent vécue comme une souffrance dont il faut se débarrasser le plus vite possible. Corriger des centaines de copies ou évaluer des dizaines de mémoires dans un laps de temps étriqués les projettent dans un défi où la qualité du travail et la tenue des délais ne sont pas compatibles. Cette activité chronophage et énergivore au cours de laquelle ils commettent des erreurs d’appréciation multiples souligne l’impossibilité de maîtriser la qualité de ce processus d’évaluation.
Cette activité apparaît aujourd’hui comme un enjeu critique dans un contexte où les établissements font face à la croissance des programmes tout en répondant aux nouvelles exigences de rigueur et d’excellence des accréditations. Comment professionnaliser cette activité cruciale tout en répondant aux attentes des étudiants d’individualisation de leur parcours ? Bref, comment industrialiser en enrichissant les interactions avec les étudiants ?
Genèse de Good Grades
C’est pour répondre à ces questions que j’ai créé Good Grades, début 2022, en association avec la société Kwark Education, une Edtech innovante renommée. Good Grades a pour vocation d’offrir aux établissements de l’éducation un Assistant Intelligent d’Evaluation d’Examen. Les enjeux sont de garantir le devoir d’équité vis-à-vis des étudiants, de transformer l’évaluation en une expérience d’apprentissage à haute valeur pédagogique et d’offrir un outil de pilotage de la qualité des programmes. Le principe de la solution est d’alléger la majeure partie de l’activité « taylorienne » du correcteur et de lui donner le recul nécessaire à l’analyse de la performance de l’examen pour l’aider à piloter la qualité de l’enseignement.
Découvrez où en est la digitalisation dans les écoles à travers cette vidéo :